Du 20 Aout au 29 Aout 1945, Guiry, sous occupation Allemande depuis plusieurs années, va être libérée par les Alliés. Un habitant retrace jour par jour les événements, en voici le récit original :
29 août – Jour de la Libération
Dans l’après-midi, on nous signalait qu’un soldat américain avait été tué sur le chemin du Thillay et que deux soldats allemands étaient également tués au bois Couturier, ce qui ne paraissait pas anormal après le bombardement que nous avions vu la veille au soir.
Mon père me demanda alors d’aller les chercher afin de les enterrer à Guiry même. J’attelai donc un cheval sur un petit tombereau et parti avec un ouvrier de la ferme ramasser ces pauvres soldats.
Le soldat américain avait été tué le matin même de la Libération au lieu-dit « Le Poirier » près de la remise dans les circonstances suivantes :
Une compagnie de fantassins américains faisait halte à cet endroit pour se reposer. Un de ceux-ci apercevant un stylo à encre à terre voulut le ramasser. Mal lui en prit, le stylo était relié à une grenade piégée (dernière trouvaille des soldats en déroute)
Ah, les grenades, il fallait se méfier!
Quelques jours plus tard nous trouvions une grenade offensive accrochée par une ficelle et pendue en l’air après une meule de blé, à 300 mètres de là.
Malheur à celui qui aurait voulu s’en saisir sans précaution.
Après avoir ramassé ce soldat, nous allons R.D. (NDLR : René Duport) et moi-même vers le bois Couturier attenant au bois de Morval. En arrivant nous avons eu la surprise de voir des « pillards » (des gens que l’on connaissait) venus ramasser des objets abandonnés, sacoches, serviettes en cuir, habits, armes et munitions etc…
Et là je ne peux raconter ce qui s’est passé par égard aux familles qui vivent encore dans le village. J’ai vu des spectacles affligeants, indignes de gens civilisés.
Bref je chargeais deux soldats allemands aidé de notre employé. L’un des soldats était complètement décapité. Nous n’avons pas trouvé sa tête, l’autre je me souviens, avait une bible dans sa poche. Détail macabre, la tête du type décapité a été retrouvé huit jours plus tard par le chien de berger de la ferme qui l’apporta aux pieds de mon père gardant le troupeau de moutons non loin de là.
De retour au village, les esprits de certaines personnes commençaient à évoluer. Le soldat américain avait droit à l’office à l’église et inhumé dans le cimetière.
Les allemands devaient rejoindre leurs trois camarades tués les jours précédents et déjà déterrés pour reposer enfin dans le bois en haut de l’avenue.
Aidé de deux autres bonnes volontés, je fus donc contraint de m’exécuter.
La belle union pendant la guerre était fissurée le jour même de la Libération. Quelques jours plus tard, un certain « Comité de Libération » prenait le contrôle de la mairie, c’était les « Résistants de dernière heure », ceux qui n’étaient pas les plus braves lors des dangers!